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Articles

Affichage des articles du novembre, 2025

Je me décante

Je me regarde dans un éclat de miroir, un morceau suffisant pour contenir tout ce que je suis devenue. Le visage derrière le verre a la constance d’un fruit trop mûr : une douceur qui menace de s'effondrer. Il cligne à peine, battre des cils est déjà une ambition. Il n’y a pas d’effroi. Seulement cette neutralité anormale qui suit les choses qui cessent de brûler. Les émotions n’arrivent plus jusqu’à moi ; elles trébuchent à l’entrée, s’excusent puis repartent. Alors je m’imite. Je fais semblant d’être la femme dont le visage me ressemble. Je note, chaque jour, une étrange évaporation : des souvenirs qui se désagrègent comme du sucre dans de l’eau tiède, des jours qui coulent à travers mes doigts sans même mouiller la peau. Je pourrais croire que je rêve en continu, si le rêve n’avait pas plus de cohérence. Rien de tragique là-dedans. Juste un glissement imperceptible, presque poli, vers un terrain où je ne fais que constater. Un terrain où mes propres mains me saluent avec la rés...

Noire est l'histoire

Arrachés de notre propre terre,  Obligés de traverser le désert,  Pieds nus, enchaînés par des ficelles de fer.  Arrivés dans les ruelles citadines raffinées,  Réduits à être des esclaves marchandés,  Contraints de rejoindre un bataillon oppressé,  Dépourvus de toute nuance de dignité,  Démembrés, dénués d’héritiers.  Au sein de ce martyre,  On a vu les nôtres périr,  D’autres succomber au désir,  Mais le chant des ficelles nous faisait vivre.  Séquestrés, emprisonnés comme des proies,  Torturés par une société qui prétendait avoir foi,  Car seule notre couleur leur donnait ce droit,  Qui n’était inscrit dans aucune loi.  Espérant que nos descendants n’oublieront pas notre combat,  Qu’ils suivront le rythme de la musique gnawa,  Celle qui transporte la vulnérabilité de notre état. Texte : Mohamed Rayane  Sekhra Illustration: Amine Lakrim

التذكرة رقم 21

زارته الكلمات قبل أشعة الشمس. لا يزال مستلقيًا على نفس السرير، تكاد تجزم أنه فارق الحياة في نومه، غير أن حركات معطفه المعلَّق على جانب السرير، تباعًا لكل شهيق، كانت تُثبت عكس ذلك. فتح عينيه وانتظر بضع ثوانٍ حتى يرى النور يتسلل عبر الخزانة، ليدرك أنه فصل جديد، أو كما يحب أن يسميه منذ أسابيع: الرقصة الأخيرة. شقةٌ تتوسّل الانفصال. يتجوّل فيها قليلًا وكأنه يودّع ما تبقّى ويحزن على ما غادر. كانت بالأمس القريب ملتقى للحكايات والنكات، وها هي الآن بالكاد تهمس بما تبقّى من صدى الأصوات. ألقى معطفه فوق كتفه، فزاده ثِقَلًا، ثم حمل عكازه وغادر دون أن يلتفت، ولو لثانية واحدة من الحنين. أمام المأوى لا يختلف المشهد كثيرًا؛ رصيفٌ لا تقبله حتى الزبالة، ومنازل تهمس لبعضها عن قساوة ما يسكنها. خطواته متثاقلة، يبطئها ضعف الجسد وتثقلها قوة الهموم. يعرف طريقه جيدًا، يتوقف أمام المقهى — مُرغمًا تارة، ومُغرَمًا تارةً أخرى. كان يحب الشطرنج؛ لعلّه يرى في قطعه بقايا الفرسان الذين كانهم يومًا ما. غادر جلّ أصدقائه المقهى… والحيّ ربما؟ كل ما يعلمه أن من تبقّى بدأ يتآكل بالنسيان. لم يقضِ سوى بضع دقائق جالسًا. استأذن ب...
  We often expect understanding hearts, gentle words and warm gestures from people. But when the opposite comes , we break , We drown in a sea of our own tears and we question our worth.  Expecting light from others will only leave us in the dark. Art : Aya Anouar Texte : Malak El Bourahi

I can fly

"I can fly!" it said with excitement, noticing its newly grown wings. "I can fly?" it said, panicking, realizing that it shouldn’t have them. "I can… fly?" it said, disturbed, understanding the absurdity of it as it slowly rose from the earth. "I can fly…" it said sadly, finally noticing the white fur covered in blood that it was leaving behind. Anonyme

Hadrian

3 mai 368   D’après le dernier rapport des espions, l’ennemi s’apprête à attaquer à l’ouest. Il y a moins de trois semaines, ils attaquaient à l’est. Si ces imbéciles réunissaient ne serait-ce qu’une seule fois leurs forces pour attaquer des deux côtés en même temps, ils reprendraient l’île de Bretagne en une seule vague. Combien de décennies encore jouerons-nous ce spectacle absurde ? Eux au nord, nous au sud, et le mur d’Hadrien au milieu, qui dessine son immuable ligne de démarcation.  Ici, la stratégie ne sert à rien. Les règles martiales ne s’appliquent pas quand l’ennemi n’en a pas le moindre enseignement. Leur énergie n’est pas celle de la rébellion ou du patriotisme. Ces ennemis-là ne connaissent que le courage conféré par l’orgueil, la vexation et la mauvaise foi. J’ai décidé, aujourd’hui, de proposer une somme d’argent colossale à leur chef en échange de sa parole de ne pas attaquer. La tradition chez ces brutes veut qu’un chef ne puisse pas rompre un serment. J’ai h...